"J'ai été aimantée par cette double mission impossible. Acheter la maison et retrouver les armes cachées. C'était inespéré et je n'ai pas flairé l'engrenage qui allait faire basculer notre existence. Parce que la maison est au coeur de ce qui a provoqué l'accident."
En un récit tendu qui agit comme un véritable compte à rebours, Brigitte Giraud tente de comprendre ce qui a conduit à l'accident de moto qui a coûté la vie à son mari le 22 juin 1999. Vingt ans après, elle fait pour ainsi dire le tour du propriétaire et sonde une dernière fois les questions restées sans réponse. Hasard, destin, coïncidences ? Elle revient sur ces journées qui s'étaient emballées en une suite de dérèglements imprévisibles jusqu'à produire l'inéluctable. À ce point électrisé par la perspective du déménagement, à ce point pressé de commencer les travaux de rénovation, le couple en avait oublié que vivre était dangereux. Brigitte Giraud mène l'enquête et met en scène la vie de Claude, et la leur, miraculeusement ranimées.
Micky Sebastian incarne avec justesse cette femme qui tente de trouver désespérément des raisons à un évènement tragique et inconcevable.
Un magistral roman d'apprentissage, une saisissante enquête sur les traces d'un mystérieux auteur menée par un jeune écrivain africain à Paris
Prix Transfuge du meilleur roman de langue française
En 2018, Diégane Latyr Faye, jeune écrivain sénégalais, découvre à Paris un livre mythique, paru en 1938 :
Le Labyrinthe de l'inhumain. On a perdu la trace de son auteur, qualifié en son temps de " Rimbaud nègre ", depuis le scandale que déclencha la parution de son texte. Diégane s'engage alors, fasciné, sur la piste du mystérieux T. C. Elimane, où il affronte les grandes tragédies que sont le colonialisme ou la Shoah. Du Sénégal à la France en passant par l'Argentine, quelle vérité l'attend au centre de ce labyrinthe ?
Sans jamais perdre le fil de cette quête qui l'accapare, Diégane, à Paris, fréquente un groupe de jeunes auteurs africains : tous s'observent, discutent, boivent, font beaucoup l'amour, et s'interrogent sur la nécessité de la création à partir de l'exil. Il va surtout s'attacher à deux femmes : la sulfureuse Siga, détentrice de secrets, et la fugace photojournaliste Aïda...
D'une perpétuelle inventivité,
La plus secrète mémoire des hommes est un roman étourdissant, dominé par l'exigence du choix entre l'écriture et la vie, ou encore par le désir de dépasser la question du face-à -face entre Afrique et Occident. Il est surtout un chant d'amour à la littérature et à son pouvoir intemporel.
"Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension."
En juin 2021, un événement insensé bouleverse les vies de centaines d'hommes et de femmes, tous passagers d'un vol Paris-New York. Parmi eux : Blake, père de famille respectable et néanmoins tueur à gages ; Slimboy, pop star nigériane, las de vivre dans le mensonge ; Joanna, redoutable avocate rattrapée par ses failles ; ou encore Victor Miesel, écrivain confidentiel soudain devenu culte.
Tous croyaient avoir une vie secrète. Nul n'imaginait à quel point c'était vrai.
Roman virtuose où la logique rencontre le magique, L'anomalie explore cette part de nous-mêmes qui nous échappe.
Robin Renucci incarne avec subtilité les personnages intrigants d'un récit à plusieurs voix. Une lecture captivante !
Mai 2016. Dans une aile ultrasécurisée du Palais de justice, la juge Alma Revel doit se prononcer sur le sort d'un jeune homme suspecté d'avoir rejoint l'Etat islamique en Syrie. A ce dilemme professionnel s'en ajoute un autre, plus intime : mariée depuis plus de vingt ans à un écrivain à succès sur le déclin, Alma entretient une liaison avec l'avocat qui représente le mis en examen. Entre raison et déraison, ses choix risquent de bouleverser sa vie et celle du pays...
Avec mon ami le guide de haute montagne Daniel du Lac, je suis parti de Menton au bord de la Méditerranée pour traverser les Alpes à ski, jusqu'à Trieste, en passant par l'Italie, la Suisse, l'Autriche et la Slovénie. De 2018 à 2021, à la fin de l'hiver, nous nous élevions dans la neige. Le ciel était vierge, le monde sans contours, seul l'effort décomptait les jours. Je croyais m'aventurer dans la beauté, je me diluais dans une substance. Dans le Blanc tout s'annule - espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé errer dans la pureté ?
S. T.
18 juillet. Hier à midi, sur la plage de Tipaza, un employé de bureau dénommé Meursault, demeurant rue Bab-Azoun à Alger, a tué de cinq balles de revolver un Arabe non encore identifié. Les motifs du crime restent inconnus. Arrêté, Meursault a été transféré à la prison d'Alger. Jugé, reconnu coupable de meurtre avec préméditation, condamné à mort et exécuté, on ne saura jamais pourquoi Meursault a tué. Il assiste à son procès comme si c'était un autre qu'on jugeait. Une profonde réflexion sur l'être et la vie.
Michael Lonsdale donne une interprétation magistrale de ce texte âpre et dense. Il nous fait toucher du doigt cette distance vis-à -vis de la réalité qui confine à l'indifférence et finalement perd Meursault.
"Toi non, bien sûr, Vadim, tu es un poète. Un poète égaré parmi les loups."
On l'appelait le mage du Kremlin. L'énigmatique Vadim K. fut metteur en scène puis producteur d'émissions de téléréalité avant de devenir l'éminence grise de Poutine, dit le Tsar. Ayant démissionné de son poste de conseiller politique, les légendes sur son compte se multiplient, sans que nul ne puisse démêler le faux du vrai. Jusqu'à ce qu'une nuit, il confie son histoire au narrateur de ce livre... Cette histoire nous plonge au coeur du pouvoir russe, où courtisans et oligarques se livrent une guerre de tous les instants. Et où Vadim, devenu le principal spin doctor du régime, transforme un pays entier en un théâtre politique d'avant-garde, au sein duquel il n'est d'autre réalité que l'accomplissement des souhaits du Tsar. Mais Vadim n'est pas un ambitieux comme les autres : entraîné dans les arcanes de plus en plus sombres du régime qu'il a contribué à construire, il fera tout pour s'en sortir, guidé par la mémoire de son grand-père - un aristocrate excentrique rescapé de la Révolution - et par l'envoûtante et impitoyable Ksenia, dont il est épris. Le mage du Kremlin, où l'on croise Limonov et Kasparov, des hommes d'affaires, des mannequins et tous les symboles du régime, nous entraîne au coeur du système Poutine.
Grand Prix du roman de l'Académie française 2022.
« La première fois que Mélanie Claux et Clara Roussel se rencontrèrent, Mélanie s'étonna de l'autorité qui émanait d'une femme aussi petite et Clara remarqua les ongles de Mélanie, leur vernis rose à paillettes qui luisait dans l'obscurité. " On dirait une enfant ", pensa la première, "elle ressemble à une poupée", songea la seconde.
Même dans les drames les plus terribles, les apparences ont leur mot à dire. »
À travers l'histoire de deux femmes aux destins contraires, Les enfants sont rois explore les dérives d'une époque où l'on ne vit que pour être vu. Des années Loft aux années 2030, marquées par le sacre des réseaux sociaux, Delphine de Vigan offre une plongée glaçante dans un monde où tout s'expose et se vend, jusqu'au bonheur familial.
Syrie. Un vieil homme rame à bord d'une barque, seul au milieu d'une immense étendue d'eau. En dessous de lui, sa maison d'enfance, engloutie par le lac el-Assad, né de la construction du barrage de Tabqa, en 1973. Fermant les yeux sur la guerre qui gronde, muni d'un masque et d'un tuba, il plonge - et c'est sa vie entière qu'il revoit, ses enfants au temps où ils n'étaient pas encore partis se battre, Sarah, sa femme folle amoureuse de poésie, la prison, son premier amour, sa soif de liberté.
En 1944, Mathilde, une jeune Alsacienne, s'éprend d'Amine Belhaj, un Marocain combattant dans l'armée française. Après la Libération, le couple s'installe au Maroc à Meknès, ville de garnison et de colons. Tandis qu'Amine tente de mettre en valeur un domaine constitué de terres rocailleuses et ingrates, Mathilde se sent vite étouffée par le climat rigoriste du Maroc. Seule et isolée à la ferme avec ses deux enfants, elle souffre de la méfiance qu'elle inspire en tant qu'étrangère et du manque d'argent. Le travail acharné du couple portera-t-il ses fruits? Les dix années que couvre le roman sont aussi celles d'une montée inéluctable des tensions et des violences qui aboutiront en 1956 à l'indépendance de l'ancien protectorat.
Tous les personnages de ce roman vivent dans «le pays des autres» : les colons comme les indigènes, les soldats comme les paysans ou les exilés. Les femmes, surtout, vivent dans le pays des hommes et doivent sans cesse combattre pour leur émancipation.
"- Tesson ! Je poursuis une bête depuis six ans, dit Munier. Elle se cache sur les plateaux du Tibet. J'y retourne cet hiver, je t'emmène.
- Qui est-ce ?
- La panthère des neiges. Une ombre magique !
- Je pensais qu'elle avait disparu, dis-je.
- C'est ce qu'elle fait croire."
"En 1999 débutait le casting pour trouver le jeune garçon qui allait interpréter Harry Potter et qui, par la même occasion, deviendrait mondialement célèbre.
Des centaines d'acteurs furent auditionnés. Finalement, il n'en resta plus que deux. Ce roman raconte l'histoire de celui qui n'a pas été choisi."
La Petite Indienne, c'est Betty Carpenter, née dans une baignoire, sixième de huit enfants. Sa famille vit en marge de la société car, si sa mère est blanche, son père est cherokee. Lorsque les Carpenter s'installent dans la petite ville de Breathed, après des années d'errance, le paysage luxuriant de l'Ohio semble leur apporter la paix. Avec ses frères et soeurs, Betty grandit bercée par la magie immémoriale des histoires de son père. Mais les plus noirs secrets de la famille se dévoilent peu à peu. Pour affronter le monde des adultes, Betty puise son courage dans l'écriture : elle confie sa douleur à des pages qu'elle enfouit sous terre au fil des années. Pour qu'un jour, toutes ces histoires n'en forment plus qu'une, qu'elle pourra enfin révéler.
'- Tu seras un héros, tu seras général, Gabriele D'Annunzio, Ambassadeur de France - tous ces voyous ne savent pas qui tu es !
Je crois que jamais un fils n'a haï sa mère autant que moi, à ce moment-là . Mais, alors que j'essayais de lui expliquer dans un murmure rageur qu'elle me compromettait irrémédiablement aux yeux de l'Armée de l'Air, et que je faisais un nouvel effort pour la pousser derrière le taxi, son visage prit une expression désemparée, ses lèvres se mirent à trembler, et j'entendis une fois de plus la formule intolérable, devenue depuis longtemps classique dans nos rapports : - Alors, tu as honte de ta vieille mère?'
De sa voix ronde et chaleureuse, Hervé Pierre restitue à merveille l'hommage de Romain Gary à sa mère. Une lecture entre rire et larmes où se succèdent scènes d'amour, d'adieu et de retrouvailles.
L'écoute en classe de ces CD est autorisée par l'éditeur.
Naples, fin des années cinquante. Deux amies, Elena et Lila, vivent dans un quartier défavorisé de la ville, leurs familles sont pauvres et, bien qu'elles soient douées pour les études, ce n'est pas la voie qui leur est promise. Lila, la surdouée, abandonne rapidement l'école pour travailler avec son père et son frère dans leur échoppe de cordonnier. En revanche, Elena est soutenue par son institutrice, qui pousse ses parents à l'envoyer au collège puis, plus tard, au lycée, comme les enfants des Carracci et des Sarratore, des familles plus aisées qui peuvent se le permettre. Durant cette période, les deux jeunes filles se transforment physiquement et psychologiquement, s'entraident ou s'en prennent l'une à l'autre. Leurs chemins parfois se croisent et d'autres fois s'écartent, avec pour toile de fond une Naples sombre mais en ébullition, violente et dure. Des chemins qui les conduiront, après le passage par l'adolescence, à l'aube de l'âge adulte, non sans ruptures ni souffrances.
Formidable voyage dans Naples et dans l'Italie du boom économique, L'amie prodigieuse trace le portrait de deux héroïnes inoubliables, qu'Elena Ferrante traque avec passion et tendresse jusqu'au plus profond de leur âme.
Prix du livre audio France-Culture / Lire dans le noir 2017
Juillet 1937. A Home Place, au coeur du Sussex, jardiniers, femmes de chambre et cuisinière sont sur le pont. La Duche orchestre le ballet des domestiques avant l'arrivée de ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Où dormira Clary, adolescente mal dans sa peau en plein conflit avec sa belle-mère ? Quelle robe portera Villy, ancienne ballerine désormais mère au foyer ? Polly, terrorisée à l'idée qu'une guerre éclate, s'entendra-t-elle avec sa cousine Louise qui rêve de devenir actrice ? Rachel, la seule fille de la Duche, trouvera-t-elle un moment pour ouvrir la précieuse lettre de son amie Sid ? Non-dits, chamailleries, profonds chagrins... Aux préoccupations des adultes font écho les inquiétudes des enfants, et à la résilience des femmes, qu'elles soient épouses, fillettes ou domestiques, répond la toute-puissance - ou l'impuissance - des hommes. L'été regorge d'incertitudes mais, sans l'ombre d'un doute, une nouvelle guerre approche : entre pique-niques sur la plage et soirées auprès du gramophone, il faudra inventorier lits de camp et masques à gaz.
C'est l'histoire d'un livre sur le yoga et la dépression. La méditation et le terrorisme. L'aspiration à l'unité et le trouble bipolaire. Des choses qui n'ont pas l'air d'aller ensemble, et pourtant : elles vont ensemble.
Avec une grande justesse, Thibault de Montalembert restitue toute la force de ce roman solaire et douloureux, qui explore sans concession les tréfonds de la psyché humaine.
Prix Goncourt des Lycéens.
L'Algérie dont est originaire sa famille n'a longtemps été pour Naïma qu'une toile de fond sans grand intérêt. Pourtant, dans une société française traversée par les questions identitaires, tout semble vouloir la renvoyer à ses origines. Mais quel lien pourrait-elle avoir avec une histoire familiale qui jamais ne lui a été racontée ?
Son grand-père Ali, un montagnard kabyle, est mort avant qu'elle ait pu lui demander pourquoi l'Histoire avait fait de lui un "harki". Yema, sa grand-mère, pourrait peut-être répondre mais pas dans une langue que Naïma comprenne. Quant à Hamid, son père, arrivé en France à l'été 1962 dans les camps de transit hâtivement mis en place, il ne parle plus de l'Algérie de son enfance. Comment faire ressurgir un pays du silence ?
Dans une fresque romanesque puissante et audacieuse, Alice Zeniter raconte le destin, entre la France et l'Algérie, des générations successives d'une famille prisonnière d'un passé tenace. Mais ce livre est aussi un grand roman sur la liberté d'être soi, au-delà des héritages et des injonctions intimes ou sociales.
Avec force et justesse, Zineb Triki retrace l'histoire d'une famille de harkis sur trois générations, depuis les prémices de la guerre d'Algérie jusqu'à aujourd'hui.
L'écoute en classe de ces CD est autorisée par l'éditeur.
Années 1960. Isabelle, Claire et Gilles vivent dans la vallée de la Santoire, avec la mère et le père. La ferme est isolée de tous.La cour est vide. La maison est fermée. Claire sait où est la clef, sous une ardoise, derrière l'érable, mais elle n'entre pas dans la maison. Elle n'y entrera plus. Elle serait venue même sous la pluie, même si l'après-midi avait été battue de vent froid et mouillé comme c'est parfois le cas aux approches de la Toussaint, mais elle a de la chance ; elle pense exactement ça, qu'elle a de la chance avec la lumière d'octobre, la cour de la maison, l'érable, la balançoire, et le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu.
Au travers de photos et de souvenirs laissés par les événements, les mots et les choses, Annie Ernaux nous fait ressentir le passage des années, de l'après-guerre à aujourd'hui. En même temps, elle inscrit l'existence dans une forme nouvelle d'autobiographie, impersonnelle et collective.
Marina Moncade est la voix sensible et délicate d'Annie Ernaux qui regarde en elle-même pour retrouver le monde, la mémoire et l'imaginaire des jours passés.
« Elle aurait pu renoncer. Elle aurait dû renoncer.
Elle se le répéta bien un million de fois toutes les années qui suivirent. Elle eut d'ailleurs une hésitation, peut-être valait-il mieux rester, se rallonger dans la chambrée, à écouter ses deux autres soeurs qui gesticulaient dans leur sommeil, pétaient et miaulaient sous leurs draps à cause de leurs rêves lascifs tout juste pubères. Peut-être valait-il mieux abdiquer, enrager, et se délecter de sa rage, puisqu'il y a un plaisir dans l'abdication, cela va sans dire, le plaisir tragique de la passivité et du dépit, le plaisir du drapage dans la dignité, on ne nous laisse jamais rien faire, on a juste le droit de se taire, on nous enferme, alors que les autres là -bas au loin s'amusent et se goinfrent, qu'est-ce que j'ai fait dans mes vies antérieures pour mériter ça, oh comme je suis malheureuse.
Peut-être aussi que le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais le jeu, n'est-ce pas, en vaut rarement la chandelle. Le jeu n'est désirable que parce qu'il est le jeu. »
Véronique Ovaldé, à travers l'histoire d'une famille frappée par une mystérieuse tragédie, ausculte au plus près les relations que nous entretenons les uns avec les autres et les incessants accommodements qu'il nous faut déployer pour vivre nos vies.
Dans une Amérique au bord du chaos politique et climatique, un père embarque son jeune fils souffrant de troubles du comportement dans une sidérante expérience neuroscientifique. Richard Powers signe un nouveau grand roman questionnant notre place dans le monde et nous amenant à reconsidérer nos liens avec le vivant.
"Enfant, quand je m'efforçais de m'exprimer dans un langage châtié, j'avais l'impression de me jeter dans le vide.
Une de mes frayeurs imaginaires, avoir un père instituteur qui m'aurait obligée à bien parler sans arrêt en détachant les mots. On parlait avec toute la bouche.
Puisque la maîtresse me "reprenait", plus tard j'ai voulu reprendre mon père, lui annoncer que "se parterrer" ou "quart moins d'onze heures" n'existaient pas. Il est entré dans une violente colère. Une autre fois : "Comment voulez-vous que je ne me fasse pas reprendre, si vous parlez mal tout le temps !" Je pleurais. Il était malheureux. Tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancoeur et de chicanes douloureuses, bien plus que l'argent."
Prix Renaudot.
Azincourt, un joli nom de village, le vague souvenir d'une bataille perdue. Ce 25 octobre 1415, il pleut dru sur l'Artois. Quelques milliers de soldats anglais qui ne songent qu'à rentrer chez eux se retrouvent pris au piège par des Français en surnombre. Bottés, casqués, cuirassés, armés jusqu'aux dents, brandissant fièrement leurs étendards, tous les aristocrates de la cour de France se précipitent pour participer à la curée. Ils ont bien l'intention de se couvrir de gloire, dans la grande tradition de la chevalerie française. Aucun n'en reviendra vivant. Avec la verve qu'on lui connaît et son sens du détail qui tue, Jean Teulé nous raconte ces trois jours dantesques où, sous une pluie battante, des milliers d'hommes se sont massacrés dans un affrontement sanglant d'autant plus désastreux que cette bataille était parfaitement inutile.